• Un  nouveau décret n° 2015-282 du 11 mars 2015 relatif à la simplification de la procédure civile, à la communication électronique et à la résolution amiable des différents vient poser de nouvelles obligations préalables à l'introduction d'une action judiciaire.

    il est désormais prévu que, sauf justification d'un motif légitime tenant à l'urgence ou à la matière considérée, l'assignation ou la requête qui saisit la juridiction de première instance devra préciser les diligences entreprises afin de parvenir à une résolution amiable du litige.

    S'il n'est pas justifié, lors de l'introduction de l'instance, des diligences en vue de parvenir à une résolution amiable du litige, le juge peut proposer aux parties une mesure de conciliation ou de médiation.

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    Quelques observations à ce sujet :

    1. La pratique avait depuis bien longtemps intégré l'utilité de se rapprocher de la partie adverse avant d'engager une procédure contentieuse. Il s'agit là de simple bon sens, ce ce d'autant que nul l'ignore l'incertitude, la longueur, le coût d'une procédure judiciaire.
    2. La loi avait déjà rendu obligatoire cette nécessité d'une tentative de résolution apaisée du litige, dans un certain nombre de matières, comme par exemple en matière de liquidation de l'indivision successorale ou du régime matrimonial. L'obligation d'engager une discussion et de tenter de parvenir à un règlement non contentieux du différend est aussi bien souvent prévue dans les contrats commerciaux. Le nouveau décret ne fait donc que systématiser et de rendre impératif ce qui existait déjà lorsque la nécessité ou la volonté des parties l'imposait.
    3. Pourquoi alors rigidifier dans un décret assorti d'exceptions qui créent de l'incertitude juridique ce que la pratique avait depuis longtemps (toujours ?) mis en place ? Pourquoi limiter le pouvoir d'appréciation du juge en lui imposant de juger conformément à de nouvelles contraintes ? Ne savait-il pas, jusqu'à présent, distinguer entre les démarches contentieuses qui, se dispensant du préalable d'un échange honnête et de bonne foi, laissaient apparaître le demandeur pour ce qu'il était, un mauvais querelleur ? N'était-il pas également conscient du fait que, dans certaines circonstances, il est vain de se perdre en discussions de salon car le différend existe et doit être tranché ? Le gouvernement, par ce nouveau décret, restreint encore la liberté d'appréciation des magistrats, d'action des parties et des avocats, dans l'espoir de bâtir un monde qui repose sur des bases erronées.
    4. Ces bases erronées, c'est la volonté de construire un monde sans conflit, dans lequel, par les vertus du dialogue et de l'échange apaisé, il serait possible de parvenir à l'harmonie universelle, et comme le proclame la vulgate gouvernementale, de "faire société".
    5. La réalité, est que la société française, comme toute société, est traversée de conflits,  culturels ou d'intérêts. L'appareil judiciaire d'Etat a précisément été mis en place pour trancher ces différends et pour éviter le règne de l'anarchie et de la force brute. Ce pouvoir régalien est la justification même de son existence. L'Etat ne doit pas démissionner devant son devoir : il doit dire le droit et trancher les différends, chaque partie ayant été assistée d'un avocat afin que ses droits soient au mieux défendus et respectés.

    Me Xavier Chabeuf

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  • Sur le blog consacré à la consommation de Rafaële Rivais :

    http://sosconso.blog.lemonde.fr/2015/04/02/faut-il-se-mefier-de-skymediator/ 

    Article de la même Rafaële Rivais dans la version "papier" du quotidien en date du 10 avril 2015 : Vol_en_retard

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  • La réparation des préjudices liés aux conditions de travail n’en finit pas de s’accroître.

     

    En effet, la jurisprudence, consciente des problématiques actuelles de souffrance au travail, et soucieuse de protéger toujours mieux le salarié contre les violations par l’employeur de ses obligations contractuelles, interprète de manière toujours plus extensive les dispositions du Code du travail.

     

    C’est ainsi que la chambre sociale de la Cour de cassation, dans un arrêt récent rendu le 3 mars 2015 (Cass. Soc., 3 mars 2015, n°13-23.521), indique de manière très claire le caractère cumulatif des indemnisations respectives de plusieurs préjudices résultant des conditions de travail du salarié, tels que la discrimination et le harcèlement moral.

     

    En l’espèce, une salariée, à la suite de plusieurs congés maternité successifs, avait vu son activité professionnelle graduellement diminuée, entraînant pour elle une diminution de sa rémunération, dont une part importante était variable, et lui occasionnant un sentiment vexatoire d’être « mise au placard ».

     

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    Elle avait alors saisi les juridictions du travail, demandant, notamment, la réparation des préjudices matériels et moraux résultant, d’une part, d’une discrimination fondée sur son état de grossesse, et d’autre part, des faits de harcèlement moral dont elle avait été victime.

     

    La Cour d’appel de Paris, après avoir retenu l’existence en l’espèce d’une discrimination fondée sur l’état de grossesse de la salariée et alloué à celle-ci une somme à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral causé, rejette la demande d’indemnisation au titre du harcèlement moral, retenant que « les griefs invoqués pour caractériser le harcèlement sont les mêmes que ceux qui ont permis à la cour de retenir l’existence d’une discrimination et que le préjudice est également identique dès lors que les dommages-intérêts indemnisent le préjudice moral qui a effectivement été subi. »

     

    Ainsi, pour la juridiction du second degré, la discrimination et le harcèlement moral s’excluraient mutuellement, dès lors que les faits qui en sont l’origine et les préjudices qui en résultent sont identiques dans les deux hypothèses.

     

    La Cour de cassation rejette cette argumentation et casse l’arrêt d’appel, jugeant que « les obligations résultant des articles L. 1132-1 [prohibant la discrimination] et L. 1152-1 [prohibant le harcèlement moral] du code du travail sont distinctes en sorte que la méconnaissance de chacune d’elles, lorsqu’elle entraîne des préjudices différents, ouvre droit à des réparations spécifiques. »

     

    Pour la haute juridiction, les préjudices causés par les faits de discrimination (« résultant de la privation d’une partie des fonctions de l’intéressée après retour de ses congés maternité ») et par ceux de harcèlement moral (« résultant de l’atteinte à la dignité et à la santé de la salariée ») sont distincts et en tant que tel, appellent deux indemnisations distinctes.

     

    La Cour de cassation se place ici très clairement en faveur du salarié, n’hésitant pas à démultiplier les préjudices pour permettre une meilleure indemnisation de ce dernier.

    Ma Manuel Dambrin et Monsieur Hugo Tanguy (élève avocat)

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