• Obligation de confidentialité et réseau socialL’obligation de confidentialité est une composante de l’obligation de loyauté.

    L’obligation de loyauté est une obligation inhérente au contrat de travail, qui n’a nul besoin d’y figurer en toutes lettres pour être applicable à toute relation de travail ; elle découle du principe d’exécution de bonne foi des conventions reconnu par l’article L.1222-1 du Code du travail, qui rappelle simplement que « le contrat de travail est exécuté de bonne foi ».

    Cette exigence se traduit, pour le salarié, par une obligation de ne pas nuire à la bonne exécution du contrat de travail et de ne pas porter atteinte aux intérêts de l’employeur.

    L’une des déclinaisons de l’obligation de loyauté est l’obligation de confidentialité, en vertu de laquelle le salarié est tenu par un devoir de discrétion aussi bien dans l’enceinte de l’entreprise qu’à l’extérieur. Cette obligation, ayant notamment pour but de préserver le savoir-faire propre de l’entreprise, elle met à la charge du salarié une interdiction de divulguer les informations à caractère confidentiel dont il aurait eu connaissance dans le cadre de ses fonctions.

    Lorsque l’employeur estime que son activité présente des risques accrus ou mérite une protection particulière, une clause de confidentialité peut être insérée dans le contrat de travail afin de rappeler cette obligation et d’en faciliter, le cas échéant, la sanction.

    Tel était le cas dans l’affaire jugée par la Cour d’appel de Paris le 23 février 2022 (Pôle 6 - chambre 10, n° 19/07192).

    Le chef de projet d’une société du groupe Safran avait publié sur le réseau social LinkedIn, deux images de coupes d’un moteur extraites de documents internes et il fût licencié pour cette raison.

    A juste titre, selon les juges : « il résulte suffisamment des éléments d’appréciation produits que les images publiées provenaient de documents internes qui n’étaient pas destinés à une publication sur un réseau social, et dont M. X n’a pu avoir connaissance que dans l’exercice de ses fonctions, et qu’il les a utilisées, sans vérifier s’il pouvait le faire, au regard des règles de confidentialité internes auxquelles il était soumis ; Il doit en être déduit, et peu important à cet égard le degré de classification de ces documents ou la circonstance que les images du moteur étaient l’objet d’un poster affiché dans les locaux professionnels, qu’il s’agit d’un manquement avéré de M. X à son obligation de confidentialité et de respect du secret professionnel rappelée par son contrat de travail ».

    Me Manuel Dambrin

     

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  • La mauvaise blague au mauvais moment« Vous savez c’qu’on dit à une femme qu’a déjà les deux yeux au beurre noir ? on lui dit plus rien : on vient déjà de lui expliquer deux fois ! ».

    C’est à la suite de ce trait d’humour qu’un animateur télé de France 2, invité sur le plateau d’une émission de divertissement d’une chaîne concurrente, a été licencié pour faute grave.

    Contestant cette décision, l’intéressé a contesté le bien fondé de son licenciement jusque devant la Cour de cassation, mais son pourvoi a été rejeté (Cour de cassation, chambre sociale, 14 avril 2022, n° 20-10852).

    Après avoir rappelé le principe de la liberté d’expression, consacrée sur le plan général par l’article 10 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme et plus précisément en droit du travail par l’article L.1121-1 du code du travail, les juges ont cependant estimé, qu’en l’occurrence, le salarié avait commis un abus de cette liberté de sorte qu’il ne pouvait pas bénéficier de la protection attachée à son exercice.

    Pour en décider ainsi, les juges ont notamment relevé que cette sortie « humoristique » était intervenue au moment où l’actualité médiatique était mobilisée autour de la révélation d’une affaire de violence envers les femmes ; que quelques jours auparavant, à l’occasion de la journée internationale pour l’élimination de la violence faite aux femmes, le Président de la République avait été annoncé des mesures visant à lutter contre les violences sexistes et sexuelles, rappelant que 123 femmes étaient décédées sous les coups, en France, au cours de l'année 2016.

    Ils ont également souligné que les propos avaient été tenus lors d’une émission diffusée en direct, à une heure de grande écoute ; que le salarié, dans les jours suivants, s’était vanté d’avoir ainsi « fait son petit buzz » et avait adopté une attitude déplacée vis-à-vis d’une candidate malgré les mises en garde de son employeur.

    Ils en ont déduit que compte tenu de l’impact potentiel des propos réitérés du salarié, reflétant une banalisation des violences à l’égard des femmes, sur les intérêts commerciaux de l’employeur, cette rupture n’était pas disproportionnée et ne portait pas une atteinte excessive à la liberté du salarié.

    Me Manuel Dambrin

     

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  • La fausse grèveSe mettre en grève, ce n’est pas juste arrêter de travailler.

    La grève en droit du travail répond à une définition bien précise. C’est ce qu’ont appris, à leur dépend, ces salariés qui ont cessé collectivement le travail en soutien à un collègue licencié et qui furent, à leur tour … licenciés.

    À la suite du licenciement pour faute grave d’un salarié, un certain nombre de ses collègues ont écrit à l’employeur pour contester ce licenciement et demander la réintégration de leur collègue. Cette protestation a été assortie d’une cessation collective concertée du travail par les protagonistes, pendant 5 jours.

    Considérant être en présence d’abandons de poste, l’employeur a prononcé le licenciement de ces récalcitrants, qui contestèrent leurs licenciements au motif que leur initiative constituait un mouvement de grève dénonçant les méthodes répressives de l’employeur. On sait en effet qu’en vertu de l’article L. 2511-1 du code du travail, « L'exercice du droit de grève ne peut justifier la rupture du contrat de travail ».

    Mais cette analyse est erronée selon la Cour de cassation, qui approuve les licenciements, après avoir rappelé que « faire grève », ce n’est pas simplement cesser de travailler, c’est avant tout porter des revendications. Or, en l’espèce, les salariés se contentaient de contester point par point les fautes imputées à leur collègue et la décision de l’employeur de le licencier, de sorte que « la cessation du travail n’était pas fondée sur une revendication professionnelle et que, dès lors, l’arrêt de travail ne constituait pas l’exercice du droit de grève » (Cour de cassation, Chambre sociale, 6 avril 2022, 20-21.586 20-21.587 20-22.525).

    Me Manuel Dambrin

     

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  • Harcèlement moral : bien choisir son jugeLe harcèlement moral fait l’objet de deux définitions légales distinctes : l’une dans le Code pénal ; l’autre dans le code du travail.

    Le Code pénal fait du harcèlement moral un délit et le définit comme « des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de vie se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale » ; il est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende lorsque ces faits ont causé une incapacité totale de travail inférieure ou égale à huit jours ou n'ont entraîné aucune incapacité de travail (art. 222-33-2-2).

    Le Code du travail, de son côté, définit le harcèlement moral comme « des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail du salarié susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel » (art. L. 1152-1).

    Les définitions sont proches mais, en pratique, les éléments constitutifs diffèrent et, selon le juge saisi (conseil de prud’hommes ou tribunal correctionnel), la solution apportée au litige pourra être différente.

    C’est ce qu’illustre l’arrêt rendu par la chambre criminelle de la Cour de cassation le 22 février 2022 (n° 21-82266).

    Dans cette affaire, les héritiers d’une salariée qui s’était suicidée à la suite d’agissements de harcèlement moral de son employeur avaient choisi la voie pénale, sans doute à tort.

    En effet, ils furent déboutés au motif que si la dégradation des conditions de travail de la salariée était établie, l’employeur n’en avait pas eu conscience.

    Autrement dit, l’élément matériel du délit de harcèlement moral pouvait être caractérisé (matérialité des faits) mais l’élément moral (l’intention coupable) faisait défaut.

    Or, en droit pénal, tout délit suppose l’intention de le commettre, en l’occurrence la conscience de dégrader les conditions de travail de la salariée.

    Cette condition n’aurait pas été requise devant le juge prud’homal, la Cour de cassation, chambre sociale, estimant que l’intention ou la conscience de harceler n’est pas nécessaire à la reconnaissance du harcèlement moral (Soc., 17 juin 2009, n° 07-43.947).

    Me Manuel Dambrin

     

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  • Prestation compensatoire : on ne saurait spéculer sur l’héritage à venir du futur ex-épouxLa prestation compensatoire est destinée à compenser la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des parties.

    Aux termes de l’article 271 du code civil, elle « est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ».

    Parmi les critères que le juge doit prendre en compte figurent notamment la durée du mariage, l'âge et l'état de santé des époux, leur qualification et leur situation professionnelles, les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, leur situation prévisible en matière de pensions de retraite, « le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial ».

    S’agissant de ce dernier critère, la question s’est posée de savoir si devaient être prises en considération, dans le patrimoine prévisible des époux, les espérances successorales des époux à la date de rupture du lien matrimonial.

    Il ne fait pas de doute que, que l’on se situe du point de vue du débiteur ou du créancier de la prestation compensatoire, la possibilité de bénéficier d’un patrimoine issu d’une succession est susceptible de bouleverser les données, et remettre en cause tant le principe même du versement d’une prestation compensatoire, que son montant.

    La Cour de cassation refuse pourtant, de manière constante, de prendre en compte les héritages susceptibles d’être perçus par les époux lorsqu’il s’agit de statuer sur la prestation compensatoire.

    Elle vient de réaffirmer sa position à l’occasion d’une affaire dans laquelle l’un des époux avait déjà perdu ses parents et perçu un héritage (celui-ci est alors pris en compte dans le calcul de la prestation compensatoire car il est intégré au patrimoine de l’époux qui a hérité), tandis que son conjoint avait ses parents encore en vie et ne voyait pas leur succession future entrer en ligne de compte.

    Le conjoint ayant déjà hérité prétendait que cette différence de traitement aboutissait à une atteinte au principe d’égalité devant la loi et demandait à la Cour de cassation de soumettre au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité visant à faire reconnaître cette rupture d’égalité, jugée inconstitutionnelle.

    La Cour de cassation a refusé de transmettre la question au Conseil constitutionnel et a confirmé sa position en considérant qu’il n’existait pas d’atteinte au principe d’égalité entre les époux devant la loi (Cass., 1ère civ., QPC, 16 février 2022, n° 21-20362).

    Cette position ne peut qu’être approuvée.

    En effet, on ne saurait considérer que la vocation successorale d’un époux constitue un droit prévisible au sens de l’article 271 du code civil.

    Quantité d’aléas sont encore susceptible d’apparaître : existence d’un testament, existence d’héritiers encore inconnus, consistance du patrimoine des parents de l’époux (existence de dettes, d’assurances vie, variation des valorisations mobilières et immobilières).

    Il n’existe qu’une espérance successorale, qui peut se concrétiser ou non, et se matérialiser à un niveau qu’il est quasi impossible d’anticiper au moment du divorce.

    Accepter de prendre en considération les héritages futurs obligerait de surcroît à opérer une sorte de pré liquidation de la succession des parents de l’époux dont les ascendants sont encore de ce monde, pour les besoins du calcul de la prestation compensatoire, ce qui serait éminemment complexe et long sur le plan pratique, et particulièrement indélicat sur le plan moral.

    Xavier Chabeuf

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  • Le certificat médicalLes contentieux sociaux cherchant à imputer une dégradation de l’état santé du salarié, à ses conditions de travail, sont nombreux, qu’il s’agisse de dénoncer un harcèlement moral ou de contester un licenciement reposant sur l’état de santé.

    La recrudescence de ces litiges peut s’expliquer dans la volonté des justiciables d’échapper aux limitations indemnitaires posées par le « barème Macron », puisque la démonstration d’une situation de harcèlement moral ou d’un licenciement discriminatoire permet de retenir la nullité de cette mesure et ainsi d’échapper au plafonnement des indemnités : le juge retrouve sa liberté de fixer le montant des dommages et intérêts comme il l’entend.

    A l’occasion de tels litiges, le salarié est généralement amené à produire des certificats médicaux, qui constituent souvent des éléments déterminants, délicats à combattre pour l’employeur, puisqu’ils ressortent de la sphère médicale.

    Se pose alors la question des mentions qui sont autorisées à figurer dans ces certificats médicaux.

    Il convient de bien dissocier, en effet, d’une part le diagnostic médical proprement dit, c’est-à-dire la description des lésions et des symptômes physiques ou psychologiques, qui relèvent de l’examen du médecin et qui a toute sa place dans le certificat médical et, d’autre part, l’origine de ces lésions, c’est-à-dire ce qui les a provoquées ; de telles considérations n’ont pas à figurer dans le certificat médical.

    Selon l’article 28 du code de déontologie des médecins, repris au Code de la santé publique (art. R. 4127-28) « La délivrance d’un rapport tendancieux ou d’un certificat de complaisance est interdite ». Ces dispositions impliquent que les certificats médicaux et, plus largement, les documents médicaux pouvant être communiqués au patient (attestations, arrêts de travail, lettres entre médecins, etc…) ne peuvent contenir que des informations que le médecin a pu constater lui-même.

    Cela exclut qu’un certificat médical fasse état d’un « harcèlement moral » ou de « souffrance au travail », ce qui reviendrait à porter un jugement divinatoire ou à poser des hypothèses sur l’origine des troubles et ainsi à établir un lien de causalité entre l’affection constatée et la dégradation des conditions de travail alléguée par le salarié.

    Concrètement, le médecin qui ne respectera pas cette partition pourra être poursuivi devant le Conseil départemental de l’Ordre des médecins et contraint de modifier les termes de son certificat médical, avant qu’il ne soit versé aux débats d’un contentieux.

    Me Manuel Dambrin

     

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  • La faute grave peut être commise après le déclenchement de la procédure disciplinaireLorsqu’il estime qu’un salarié a commis une faute d’une gravité telle que sa présence dans l’entreprise n’est pas possible, ne serait-ce que le temps de la procédure disciplinaire, l’employeur a la possibilité d’écarter immédiatement le salarié en assortissant sa convocation à l’entretien préalable au licenciement, d’une mise à pied conservatoire (celle-ci permettant également de vérifier la réalité et/ou la gravité des faits reprochés).

    La particularité de l’affaire qui a donné lieu à la décision de la Cour de cassation du 9 mars 2022 (Chambre sociale, n°20-19.744) est que les faits retenus à l’encontre de la salariée ne sont pas ceux commis avant sa mise à pied et qui étaient à l’origine de celle-ci, mais des faits commis durant la mise à pied et donc postérieurement à la convocation à l’entretien préalable. 

    D’où la question qui se posait à la Cour de cassation :

    Un salarié peut-il être licencié pour des faits qui ne sont pas ceux à l’origine de la procédure de licenciement et qui étaient donc inconnus de l’employeur au moment de l’engagement de la procédure ?

    En l’occurrence, une vendeuse de la société Mango France, soupçonnée d’avoir volé une paire de chaussures, avait, durant la mise à pied conservatoire dont elle avait fait l’objet, missionné une collègue pour remettre la paire de chaussures en place.

    C’est cette attitude, jugée déloyale, qui sera à juste titre sanctionnée, selon les Hauts magistrats :

    « Ayant relevé qu’au cours de sa mise à pied conservatoire, la salariée avait tenté, par l’emploi d’un stratagème consistant à impliquer une collègue, de dissimuler frauduleusement un vol commis au préjudice de son employeur alors qu’elle était toujours tenue, à son égard, d’une obligation de loyauté et que de tels faits mettaient en cause sa probité, peu important qu’aucune faute antérieure à sa mise à pied conservatoire ne puisse lui être reprochée, la cour d’appel a pu décider que cette faute, ainsi caractérisée, rendait à elle seule impossible la poursuite du contrat de travail et constituait une faute grave ».

    Me Manuel Dambrin

     

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  • La rupture conventionnelle à l’épreuve du vice du consentementLa rupture conventionnelle est un mode autonome de rupture du contrat de travail, alternatif au licenciement et à la démission, qui permet à l’employeur et au salarié de convenir, d’un commun accord, des conditions de la rupture du contrat de travail.

    Comme tout accord, sa validité suppose que les parties y aient librement adhéré, c’est-à-dire que leur accord ne doit pas avoir été affecté par l’un des vices du consentement que sont : l'erreur, le dol ou la violence. Il ne peut en effet y avoir d'engagement valable que si, à l'instant où il s'engage, celui qui contracte, se trouve libre de toute contrainte.

    C’est ce qu’illustre l’arrêt rendu par la Cour de cassation, Chambre sociale, le 4 novembre 2021 (n°20-16.550).

    Dans l’affaire qui a donné lieu à cette décision, une rupture conventionnelle avait été signée en bonne et due forme mais la salariée en avait ensuite demandé l’annulation au motif qu’elle n’y avait pas librement consenti.

    La Cour d’appel a fait droit à cette demande en relevant « qu’à la date de la signature de la convention de rupture conventionnelle, l’employeur, informé par la salariée de faits précis et réitérés de harcèlement sexuel de la part de son supérieur hiérarchique, n’avait mis en œuvre aucune mesure de nature à prévenir de nouveaux actes et à protéger la salariée des révélations qu’elle avait faites, en sorte que celle-ci, qui se trouvait dans une situation devenue insupportable et dont les effets pouvaient encore s’aggraver si elle se poursuivait, n’avait eu d’autre choix que d’accepter la rupture et n’avait pu donner un consentement libre et éclairé ».

    Cette solution est approuvée par la Cour de cassation : « La cour d’appel, qui a fait ressortir l’existence d’une violence morale, a légalement justifié sa décision ».

    Me Manuel Dambrin

     

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  • Un accident du travail qui tombe pile-poilUn accident du travail se définit comme « un évènement soudain qui, quelle qu’en soit la raison, cause un dommage corporel ou psychologique et survient au temps et au lieu du travail ».

    Ainsi, dès lors que l’accident se produit pendant le temps et sur le lieu du travail il est présumé revêtir la qualification d’accident du travail et doit entrainer les conséquences attachées à cette qualification (déclaration d’accident du travail dans le 48 heures auprès de la CPAM, majoration des indemnités journalières versées par la CPAM, protection contre le licenciement, indemnités de rupture majorées en cas de licenciement pour inaptitude subséquent, avantages conventionnels divers, etc…).

    La seule façon de disqualifier l’accident du travail est d’« établir que la lésion a une cause totalement étrangère au travail ».

    C’est la preuve qu’avait tenté de rapporter l’employeur de ce salarié qui, à l’issue d’un entretien préalable à un éventuel licenciement, avait fait un malaise.

    L’employeur soutenait que l’entretien, au cours duquel l’intéressé était assisté par un délégué du personnel, n’avait été le théâtre d’aucun incident ou comportement anormal de la part de la hiérarchie du salarié qui puisse avoir causé son malaise ; que si l’intéressé évoquait dans ses écritures un harcèlement, il ne prouvait pas qu’il aurait été victime d’actions malveillantes et répétées de la part de son employeur dont la conséquence directe aurait été son malaise ; qu’en ce qui concerne les lésions, le certificat médical décrivait un « choc émotionnel » mais qu’un choc émotionnel n’est pas une lésion au sens de la législation professionnelle. Il soutenait enfin que le médecin hospitalier avait retenu comme motif de la consultation un malaise vagal, qui n’est pas davantage une lésion au sens de la législation professionnelle, ajoutant que le salarié bénéficiait d’un suivi psychiatrique depuis cinq ans.

    Mais ces éléments ne suffiront pas à écarter la qualification d’accident du travail selon la Cour de Cassation, pour qui « le malaise de la victime était survenu aux temps et lieu de travail, ce dont il résultait que l’accident litigieux était présumé revêtir un caractère professionnel » (Cour de cassation, Chambre civile 2, 9 septembre 2021, 19-25.418).

    Me Manuel Dambrin

     

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  • Quand l’absence de travail mérite salaireTout travail mérite salaire, mais une absence de travail peut également être rémunérée. C’est ce que l’on appelle la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet.

    Le principe est qu’un salarié embauché à temps partiel (moins de 35 heures hebdomadaires) doit savoir selon quels horaires et à quel rythme il va devoir travailler, pour être à même, s’il le souhaite, de compléter cet emploi par un autre travail lui permettant, à la fin du mois, de pouvoir compter sur un revenu correspondant à une activité pleine.

    Pour permettre cet objectif social, le code du travail (art. L.3123-6) prévoit que le contrat de travail à temps partiel doit être écrit et doit mentionner la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou entre les semaines du mois. En outre, en cas de modifications de cette répartition, celle-ci doit être communiquée au salarié avec un délai de prévenance lui permettant de s’organiser.

    Si ces prescriptions ne sont pas respectées, alors le contrat est « présumé conclu à temps complet » et l’employeur ne peut renverser cette présomption qu’en démontrant, d’une part, que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et, d’autre part, qu’il n’avait pas à se tenir constamment à sa disposition.

    Si cette double preuve n’est pas rapportée, alors l’employeur est condamné à verser au salarié un rappel de salaire, comme si ce dernier avait travaillé à temps complet.

    C’est ce qu’illustre l’affaire qui a donné lieu à la décision du 8 octobre 2021 rendu par la Cour d'appel d'Aix-en-Provence (n° 18/13805).

    Dans cette affaire, l’agent de sécurité d’une société de gardiennage se plaignait de recevoir ses plannings mensuels tardivement, ce qui l’empêchait matériellement d’entrer au service d’un autre employeur et revenait, en pratique, à le placer constamment à la disposition de la société, précisant de surcroît que ses plannings comportaient des horaires variant d’un mois sur l’autre.

    Sa réclamation est accueillie : la Cour d’appel retient qu’« Il ressort de ces plannings que le salarié était au mieux informé de ses horaires de travail quatre jours avant le début du mois, alors que le délai conventionnel de prévenance est d’une semaine » ; qu’ « Il ressort par ailleurs de ces plannings que le salarié travaillait selon un rythme non prévisible […] donc sans aucune régularité dans la répartition du temps de travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois » ; qu’ainsi, « l’employeur, qui ne verse aucun élément probant, ne démontre pas que le salarié pouvait prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’était pas tenu de se tenir constamment à sa disposition ».

    Me Manuel Dambrin

     

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