• « You’re fired ! » : petits rappels sur la révocation des dirigeants

    Le statut du dirigeant, mandataire social, est précaire.

    Ainsi, peut-il être révoqué à tout moment (sur un mouvement de tête, ad nutum), sans préavis, précision de motifs, ou indemnités.

    L’absence de justes motifs à la révocation peut donner lieu à contrôle par le juge, et à indemnisation, mais non à réintégration dans les fonctions.

    Mais même si la révocation est justifiée, elle ne doit pas prendre la forme d’un abus dans les conditions dans lesquelles elle intervient, soit parce qu’elle se déroule dans des conditions vexatoires, soit parce que le principe du contradictoire n’a pas été respecté, le dirigeant ne s’étant pas vu offrir la possibilité d’exposer les raisons pour lesquelles il estime que le maintien dans ses fonctions serait justifié.

    Evidemment, tout est question de circonstances, et la jurisprudence en la matière est pour le moins fluctuante, raisonnant au cas par cas.

    Mais il faut garder à l’esprit qu’une fois respectées les limites ci-dessus rappelés, le principe doit rester celui d’une grande liberté dans la motivation et la forme de la révocation d’un dirigeant.

    C’est ce qu’a rappelé la chambre commerciale de la Cour de cassation dans un arrêt du 24 mai 2017 (Cass. com., 24 mai 2017, n° 15-21.633) dans l’affaire suivante : un dirigeant était considéré comme défaillant par le conseil d’administration de la société, tant sur le plan de sa gestion des affaires que s’agissant du management de ses équipes, qui se défiaient de lui.

    Invité à se présenter devant le conseil d’administration une dizaine de jours avant la tenue de celui-ci et informé du fait que sa révocation était envisagée, et ayant eu l’opportunité de présenter son point de vue, le principe du contradictoire avait été respecté.

    Une fois la décision prise, le dirigeant a immédiatement été privé d’accès à son serveur et à son adresse électronique, sa ligne téléphonique a été coupée, il a dû rendre sa voiture, et quitter son logement dans le délai d’un mois.

    Le dirigeant soutient que les conditions de cette révocation sont brusques et humiliantes, vexatoires, et portent atteinte à sa réputation.

    La Cour de cassation juge qu’il n’en est rien : d’une part, il a été averti plusieurs jours avant, a pu s’expliquer, la révocation était abondamment motivée ; d’autre part, les mesures le concernant, certes strictes, « étaient inhérentes à ses fonctions », sans qu’il ait été porté atteinte à sa réputation et à son honneur.

    Il n’y a pas loin du Capitole à la roche Tarpéïenne.

     

    Me Xavier Chabeuf