• L'art de se tirer une balle dans le pied

    L'art de se tirer une balle dans le piedLa cour d’appel qui a constaté que la lettre de licenciement reprochait au salarié d’avoir saisi le Conseil de Prud'hommes pour faire pression sur son employeur et influer sur la procédure de licenciement en cours en a exactement déduit que ce grief, constitutif d’une atteinte à la Liberté fondamentale d’ester en justice, entraînait à lui seul la nullité du licenciement.

    C’est le sens de l’arrêt rendu le 30 septembre 2020 par la Chambre sociale de la Cour de cassation (n° 19-13.593) dans les circonstances suivantes :

    Un directeur d’exploitation est mis à pied à titre conservatoire et convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement. Diverses négligences et fautes professionnelles lui sont reprochées (absence de visite et de contrôle des sites, défaut d’encadrement, carence dans l’organisation des remplacements et refus de rendre des comptes).

    Sans attendre la notification de son licenciement, l’intéressé saisi le Conseil de Prud'hommes.

    Cette initiative va conduire l’employeur, croyant bien faire, à motiver le licenciement, non seulement par les fautes professionnelles initialement reprochées au salarié, mais aussi par le fait « d’avoir engagé des manœuvres visant à faire pression sur son employeur et à influer sur la procédure engagée », la lettre de licenciement reprochant explicitement au salarié d’avoir « d’ores et déjà saisi le conseil de prud’hommes d’une procédure de contestation du licenciement qui n’avait pas même été prononcé ».

    Grave erreur que celle d’avoir ainsi motivé le licenciement.

    Pour les juges, en effet, le fait pour l’employeur de reprocher, dans la lettre de licenciement, d’avoir d’ores et déjà saisi la juridiction prud’homale constitue une atteinte à la Liberté fondamentale d’ester en justice entraînant à elle seule la nullité du licenciement, sans qu’il y ait lieu d’examiner les autres griefs invoqués par l’employeur pour vérifier l’existence d’une cause réelle et sérieuse et a fortiori d’une faute grave. Le licenciement est donc annulé.

    Me Manuel Dambrin

     

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